Une proposition de loi, déposée au Sénat par Mme Françoise LABORDE (RDSE), visait à étendre le respect du principe de laïcité aux crèches privées, suite à laffaire récente de lassociation « Baby-Loup ».
On rappelle néanmoins que la Cour dAppel de Versailles avait confirmé la validité du règlement intérieur de cette crèche privée subventionnée, imposant à ses salariés la neutralité religieuse : toutes les dispositions initiales proposées nétaient sans doute pas exemptes de défauts.
Mais le pire est venu des amendements présentés par Alain Richard (PS), et adoptés par la majorité sénatoriale. Véritablement détournée, la proposition a été votée par le Sénat le 17 janvier 2012, et transmise à lAssemblée Nationale.
Larticle 2 introduit subrepticement deux dispositions contraires au principe de séparation posé par la loi de 1905 :
« Les deux alinéas précédents [obligation de neutralité du personnel] ne sont pas applicables aux personnes morales de droit privé se prévalant dun caractère propre porté à la connaissance du public intéressé. Toutefois, lorsquelles bénéficient dune aide financière publique, ces personnes morales accueillent tous les mineurs, sans distinction dorigine, dopinion ou de croyances. Leurs activités assurent le respect de la liberté de conscience des mineurs. »
Ainsi serait explicitement introduite la possibilité pour les collectivités publiques de subventionner les crèches confessionnelles (comme le fait la Mairie de Paris avec les crèches intégristes Loubavitch).
La condition vertueusement posée d« accueillir tous les mineurs, sans distinction dorigine, dopinion ou de croyance » et de « respecter la liberté de conscience des mineurs » ne saurait masquer cette nouvelle atteinte au principe de séparation.
De surcroît, serait étendue aux crèches confessionnelles la notion de « caractère propre », qui ne sappliquait jusquici quau seul enseignement scolaire. Or ce principe a été inventé de toutes pièces par le Conseil Constitutionnel en 1977 pour justifier le subventionnement public de lenseignement privé confessionnel sous contrat (loi Guermeur) : cest de ce fâcheux précédent que se réclame explicitement Alain Richard. Les défenseurs de la laïcité de lécole publique apprécieront ce soutien inattendu aux lois scolaires anti-laïques.
Les débats montrent, hélas, que sur ces deux points, aucune contestation de fond ne sest exprimée.
Cette remise en cause, venant de la gauche, est préoccupante : « se faisant un paravent du manteau de la laïcité », elle fait suite à celles du Conseil dÉtat (arrêts du 19 juillet 2011) étendant les possibilités de subventions publiques dinvestissement aux cultes.
Que vaut, dès lors, lengagement du candidat socialiste à la Présidence de la République de « constitutionnaliser la loi de 1905 » ?
LUFAL réaffirme que la laïcité ne peut se concevoir sans lapplication intégrale du principe de séparation proclamé par larticle 2 de la loi de 1905 : « la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. »
par l'UFAL
A lire l'intervention d'Isabelle Pasquet Groupe communiste républicain et citoyen