Augmentation inquiétante du nombre d'internements psychiatriques sous contrainte

Question n° 17239 adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes publiée le 09/07/2015

Mme Annie David attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes au sujet de l'augmentation, constatée depuis 2011, du nombre d'internements psychiatriques sous contrainte en France. D'après les rapports annuels d'activité des commissions départementales des soins psychiatriques (CDSP), plus de 76 580 mesures de soins sous contrainte ont été enregistrées en 2013, soit 5 200 procédures supplémentaires comparées à l'année 2011 (+13,8 %). La France pratique ainsi, en moyenne, deux fois plus d'internements sous contrainte que ses voisins européens. D'après les rapports des CDSP, l'augmentation est essentiellement due à un détournement de la loi qui régit ces hospitalisations et, notamment, à l'utilisation trop fréquente des procédures dites « d'urgence » et de « péril imminent », alors même que celles-ci devraient être réservées à des cas rares. Ainsi, en 2013, plus de 65 % des hospitalisations à la demande d'un tiers ont été faites selon ces procédures. Elle souhaite ainsi savoir si le ministère de la santé compte mener un examen précis des évolutions mentionnées, afin d'identifier d'éventuelles utilisations abusives des procédures d'urgence et de péril. De plus, si ce recours abusif était avéré, elle souhaite connaître les mesures qui seront prises par le ministère pour limiter ces abus.

Réponse de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes publiée le 26/11/2015

Texte de la réponse : Les données issues des rapports d'activité des commissions départementales des soins psychiatriques (CDSP) ne sont plus utilisées comme outil statistique sur les soins psychiatriques sans consentement. Depuis plusieurs années, de nouvelles sources de données permettant de décrire les patients en soins sans consentement, ont été mises en place dans la statistique annuelle des établissements de santé (SAE) ainsi que dans le recueil d'informations médicalisées en psychiatrie (RIM-P) qui gagne en exhaustivité depuis 2007. Ainsi, en 2012, une première estimation du nombre de mesures de soins sans consentement à partir du RIM-P a été publiée pour les années 2007 à 2010 par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère des affaires sociales et de la santé. De nouveaux travaux obtenus à partir du RIM-P ont été publiés par l'institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES) en janvier 2015 et ont permis d'étudier l'évolution du nombre de patients en soins sans consentement après le vote de la loi du 5 juillet 2011. D'après cette étude, la part du recours aux soins sans consentement parmi le recours aux soins en psychiatrie n'a pas augmenté en 2012. En 2012, plus de 77 000 patients (contre 74 000 en 2010) ont été pris en charge au moins une fois sans leur consentement en psychiatrie, soit une augmentation de 4,5 % par rapport à 2010. Mais cette hausse est conforme à l'augmentation de la file active totale suivie en psychiatrie en établissement de santé : les patients ayant reçu des soins non consentis représentent toujours près de 5 % de la file active en 2012. L'étude montre également que la répartition des différents modes légaux reste à peu près similaire à celle observée en 2010. La création d'une procédure dite de péril imminent par la loi du 5 juillet 2011 n'a pas fait augmenter de manière significative la part des patients pris en charge sous la forme de soins sur décision du directeur de l'établissement (80,3 % en 2010, 83,7 % en 2012).

Billet original sur Senat Groupe CRC